Cher magazine Jeune et Crétine,
Je t’écris pour te dire merci. Grâce à toi, j’ai découvert ma vocation. Je n’ai plus de doutes à présent ; hier, j’étais paumée; ce matin, dans tes pages, j’ai eu l’illumination : je vais devenir « it-girl ». En français, ça pourrait se traduire par « la fille populaire du moment » mais je suggère de garder la version anglaise.
Au milieu de tes pages beauté, je suis tombée sur l’interview d’une it-girl. Le choc! Je la connaissais pas, elle était là pour nous parler d’elle, de ses tifs, blonds et longs qu’on aurait plus eu à lui envier si on utilisait les mêmes soins capillaires qu’elle puisqu’on se serait magiquement retrouvé avec les mêmes. J’ai pas le projet immédiat de me faire blonde, mais poussée par la curiosité, j’ai voulu découvrir ce que cette fille avait à me dire sur cette double page qui lui était consacrée. Une décision qui a bouleversé ma vie, ma parole.
Tout de suite, tu m’as mise dans la confidence, et t’as bien fait, parce que le visage de la belle m’était inconnu. Cette fille, tu m’expliques, c’est la it-girl du moment d’abord parce que c’est pas n’importe qui, bordel : sa sœur fait la top-model. Les gènes, donc. Les gènes. Après, tu remarques que la fille sait trop bien s’entourer. C’est la coloc de Sienna Miller, la copine de Karl L. Purée, elle a bon goût, la meuf.
En plus, c’est pas une petite fille à sa maman. Elle a dix-neuf ans, mais c’est déjà une grande fille, elle est carrément autonome : elle gagne bien sa vie comme mannequin, elle est ambassadrice d’une grande marque de cosmétiques… Mais, son cv, tu ajoutes, n’a rien à voir avec le fait que maman est chroniqueuse au British Vogue, que papy était directeur général de deux prestigieuses publications, que parrain est le PDG des éditions Condé Nast Britain., etc. Non non non, si la demoiselle est une it-girl, c’est avant tout grâce à son talent. Je comprends pas pourquoi tu te sens obligé de le préciser, franchement, ça saute aux yeux.
A ce stade-là, je me dis que mes carottes sont presque cuites parce que question pedigree, on ne joue pas dans la même catégorie, elle et moi… mais je ne me laisse pas aller au découragement, j’ai envie d’y croire encore. Je suis prête à apprendre, à lui pomper ses secrets, à devenir elle. Moi, plus qu’au talent, je crois au travail. Je poursuis ma lecture, hyper attentive. Je prends des notes. Comme je suis sympa (je suis super motivée pour devenir populaire), je vous livre mes conclusions. Me remerciez pas.
1) La it-girl est spontanée.
Quand elle accueille la journaliste venue l’interviewer, elle saute au plafond : « woah ! Vos baskets sont trop de la balle ! Je veux trop les mêmes ! ». La journaliste avoue halluciner, parce que « se faire complimenter par la plus stylée des it-girls, ça n’arrive pas tous les jours ».
=> Je note : ne pas avoir peur de passer pour une mongole ou une gamine de douze ans. Être prête à tout.
2) La it-girl est belle mais simple
« Elle a un visage tout en finesse et une chevelure longue et platine façon Daenerys Targaryen dans « GOT ».
=> Je note : se faire interviewer par une journaliste fan de Harlequin.
3) La it-girl S’HABILLE (t’as bien lu : elle ne reçoit pas dans son salon naked ! Elle a de la pudeur) pour recevoir la journaliste, qui n’en revient pas : « une combinaison bleu ciel et des escarpins nude, une tenue simple, mais au tombé parfait ».
=> Je note : avant de me faire interviewer, toujours vérifier que j’ai mis une culotte et des vêtements par dessus.
4) La it-girl a des réflexions trop profondes sur la femme
Elle ignore les banalités. Ses phrases deviendront des leitmotiv pour des générations de femmes partout dans le monde. Elle dit : « la chevelure est un symbole très important chez une femme. Ça reflète une personnalité, une identité ».
=> Je note : relire toute la collection Harlequin. Demander à la journaliste une liste de ses Harlequin préférés.
5) La it-girl est proche de sa maman qui lui a appris à devenir une femme forte
Émue, elle partage de tendres souvenirs d’enfance : « S’il y a une chose que ma mère m’a apprise, c’est la pose de mascara. Beaucoup sur les cils du haut et beaucoup sur les cils du bas pour un regard super malicieux ».
=> Je note : apprendre par cœur et répéter cette anecdote croustillante, la voix tremblante et les yeux mouillés, pour montrer combien ces paroles maternelles, pleines de sagesse bouddhiste, résonnent encore dans ma tête.
6) La it-girl est ambitieuse
Les filles, prenez-en de la graine, la it-girl voit loin : « Je pense ouvrir un resto avec mes copines, parce que je trouve ça méga cool de recevoir mes potes pour faire la fiesta».
=> Je note : me débarrasser de mon cerveau. Ne servira plus à rien.
Cher magazine Jeune et Crétine, merci encore, vraiment ! C’est trop génial de donner la parole à des filles qu’ont autant de choses à nous dire et à nous apprendre ! Je t’aime ! Surtout continue comme ça !